L’Expérience du polyéthylène hautement réticulé à l’hôpital Cochin

L Vastel, JP Courpied

Rappel succinct sur le PE : (Pour plus d’infos lire les conférences D’enseignement SOFCOT 1997 et 2008 par F Langlais et M Hamadouche, y compris bibliographies)

Le polyéthylène est un des polymères les plus simples et les moins chers. Il s’agit d’un plastique inerte. Il est obtenu à partir de monomères d’Ethylène (-CH2) qui par polymérisation donne – (CH2-CH2)n-

On classe les polyethylènes en fonction de leur densité, qui dépend du nombre et de la longueur des ramifications présentes dans le matériau.

Schématiquement, les polyéthylènes de basse densité sont utilisés pour la fabrication de produits souples (sacs, films, bouteilles de Ketchup), les PE de haute densité sont utilisés pour la fabrication de produits rigides (flacons, bouteilles…) et parmi ces produits rigides on trouve les implants prothétiques, fabriqués à base de UHMWPE (Ultra High molecular weight PE)

Plus les chaînes de polymères sont longues et ramifiées, plus le poids moléculaire moyen est élevé, et plus l’implant est rigide, dur, donc intéressant notamment sur le plan tribologique en chirurgie prothétique.

Une fois le polyéthylène fabriqué (par extrusion, moulage ou compression), il doit encore être stérilisé avant utilisation.

L’irradiation gamma (ou le vieillissement sur un temps assez long) a pour effet de casser les longues chaînes macromoléculaires qui peuvent dés lors se comporter de trois façon différentes :

  • Production de radicaux libres qui vont se recombiner avec l’oxygène présent dans le milieu. Après ce phénomène, les chaînes résiduelles sont moins longues, donc le PE de moindre qualité tribologique. La vitesse et la quantité d’oxydation dépend de la quantité d’O2 dans le milieu (grosse altération si irradiation sous air, peu si stérilisation de surface)

  • La recombinaison (la chaîne se reforme), sans conséquence notable

  • La réticulation, qui consiste à « se brancher » sur une chaîne macromoléculaire voisine. La longueur des chaînes, donc le poids moléculaire moyen augmente, les propriétés tribologiques aussi. C’est l’effet recherché lorsqu’on irradie sans oxygène (gaz rare), en « forçant » les chaînes à établir des ponts entre elles plutôt qu’avec des radicaux libres.

On parle de PE conventionnel lorsque la stérilisation ne se donne pas pour objectif supplémentaire d’augmenter la réticulation.

Les moyens d’augmenter la réticulation (et donc d’obtenir un PE « hautement réticulé » sont au nombre de 2 

Stérilisation en milieu dépourvu d’oxygène (supérieure à 5 Mrads) afin de réduire l’oxydation initiale.

Traitement thermique secondaire visant à « stériliser » les radicaux libres présents dans le milieu et réduisant le risque oxydatif secondaire. On distingue le « Recuit », chauffage inférieur au point de fusion du PE (<150°C), et la fusion, donnant un résultat plus complet.

Ces traitements doivent être suivis d’une nouvelle étape de stérilisation, logiquement après ce qui vient d’être évoqué une stérilisation de surface.

Depuis 2000, nous utilisons un polyéthylène hautement réticulé à l’hôpital Cochin. Il s’agit du DURASUL® , polyethylène GUR 1050, fabriqué par compression à chaud, puis usiné pour obtenir un cotyle de type Charnley. Il subit une irradiation de 9,5 MRads et est ensuite refondu avant stérilisation finale par Oxyde d’Ethylène.

Nous l’avons comparé dans le cadre d’une série prospective randomisée au Polyéthylène DURATION®, GUR 415, Compression à chaud, 3 MRads sous Azote, avec recuit post irradiation.

La série comportait 144 implants (83 Durasul, 61 Duration), les données démographiques étant comparables entre les deux séries (Age, Sex ratio, BMI, score fonctionnel préop).

La technique classique de l’hôpital Cochin a été employée, comportant tige de Charnley, tête de 22,2 en CoCr, cimentation sur les deux versants et implantation par voie trans-trochantérienne. Il s’agit d’une étude monocentrique, monoopérateur.

Les mesures de pénétration linéaire et volumétriques après numérisation des clichés et utilisation du logiciel de Martell (HipSuite 4.0) à 2ans et demi de recul moyen sont en faveur du polyéthylène hautement réticulé : 0,10 vs 0,24 mm/an pour la pénétration linéaire, 23,94 mm3/an vs 57,36 mm3/an.

Ce que nous ne savons pas :

Comportement mécanique à long terme. L’irradiation diminue la résistance à la propagation de fissures et le niveau de la contrainte à rupture. La refonte utilisée aggrave la réduction de résistance mécanique, notamment en fatigue. Certains pensent d’ailleurs que ces polyéthylènes de devraient pas être utilisés pour les prothèses de Genou.

L’effet sur l’ostéolyse à long terme. Si la réduction d’usure est un élément positif, confirmé dans plusieurs séries cliniques, la taille des particules d’usure est différente d’un PE à l’autre, et l’ostéolyse un phénomène plurifactoriel dépendant notamment de la taille des grains.

Au total :

La réticulation des PE est très probablement un avantage tribologique sensible dans le cadre des PTH. La confirmation des données actuelles, obtenues sur des reculs encore faibles, est nécessaire afin de quantifier le progrès réalisé. Il n’est pas certain que l’utilisation d’un PE Hautement réticulé pour les prothèses de genou soit une solution optimale sue le plan tribologique, même si a logique industrielle vas dans ce sens.

 

 

 


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