Arthroplastie d'épaule dans les séquelles de fracture de l'extremité supérieure de l'humérus (ESH)

Dr Jean Kany clinique de l’Union de Toulouse
Dr Jérôme Garret clinique du Parc de Lyon

Les résultats des prothèses d’épaule non contraintes (hémiarthroplastie ou prothèses totales) dans les séquelles de fracture de l’extrémité supérieure de l’humérus sont plutôt décevants et assez imprévisibles. L’utilisation de prothèses inversées a permis d’obtenir de meilleurs résultats.

L’étude du Dr Trojani lors du congrès de Nice 2001 ; à propos de 221 patients opérés par prothèses non contraintes (124 hémiarthroplastie et 99 prothèses totales) pour des séquelles de fracture de l’ESH, retrouvent un taux de complications de 27%, un gain sur la douleur de 7 points (passant de 4.5 à 11.5), une amélioration du score de constant de 30% (passant de 27 à 42). L’élément péjoratif principal est la nécessité d’une ostéotomie du trochiter pour cal vicieux. Les résultats obtenus avec une ostéotomie du trochiter sont mauvais.

L’étude du Dr Neyton lors du  Nice Shoulder Course 2006 ; à propos de 45 patients opérés par prothèses inversées pour des séquelles de fracture de l’ESH, retrouvent un taux de complications de 23%, un gain sur la douleur de 8 points (passant de 4 à 12), une amélioration du score de Constant de 46% (passant de 29 à 75%). 83% des patients sont satisfaits ou très satisfaits du résultat de leur opération.

Pour analyser les séquelles de fracture de l’ESH, nous utilisons  la classification en 4 types anatomiques des docteurs Boileau et Walch (JSES 2001) :

Type I :  Collapsus ou ostéonécrose céphalique post traumatique.

Type II : Luxation  ou  fracture luxation invétérée de l’épaule.

Type III : Pseudarthrose du col chirurgical de l’extrémité supérieure de l’humérus.

Type IV : Cal vicieux sévère des tubérosités de l’ESH.

Type I :
cephalic collapse or necrosis

Type II :
Locked dislocation or fracture-dislocation

cephalic collapse or necrosis

locked dislocation or fracture-dislocation

Type III :
Surgical neck non union

Type IV :
Sévère tuberosity malunion

severe tuberosity malunion
surgical neck non union

 

La comparaison de ces 2 études entre prothèses non contraintes et prothèses inversées aident à préciser les indications.

Séquelles de type I : (collapsus ou ostéonécrose céphalique post traumatique).

Les prothèses non contraintes sont indiquées avec globalement des résultats identiques aux prothèses inversés ( Constant de 85%, EAA 120°) .La  rotation externe est meilleur dans les prothèses non contraintes ; elle est 32° au lieu de 18° pour les prothèses inversées. La présence d’une coiffe « efficace » est une condition à un bon résultat de prothèse non contrainte, sinon il faut préférer une prothèse inversée.

Séquelles de type II :(luxation ou fracture luxation invétérée)

Les résultats obtenus sont identiques entre prothèses non contraintes et prothèses inversées ( Constant de 81%, EAA 117°, RE 20°). Nous préférons utiliser une prothèse inversée dans les luxations antérieures invétérées, car la stabilisation d’une prothèse non contraintes est très difficile. La stabilisation d’une prothèse non contrainte dans les luxations postérieures invétérée semble plus facile. Le problème essentiel restera la fixation de l’implant glénoïdien, du fait de la perte de substance osseuse, souvent massive dans la région antéro inférieure de la glène, liée à la luxation chronique invétérée. Il faudra parfois envisager une chirurgie en 2 temps avec greffe de glène, mais dont les résultats restent encore peu publiés ; cette greffe concernant un os souvent de mauvaise qualité par l’âge élevé des patients concernés et le manque d’utilisation chronique de l’articulation.

Séquelles de type III : (pseudarthrose du col chirurgical)

C’est dans cette catégorie que le taux de  complications est le plus élevé et les résultats les plus décevants aussi bien avec les prothèses inversées que les prothèses non contraintes (Constant 58%, EAA 83°). Il faut préférer dans tous les cas où cela est possible (épiphyse humérale conservable) une reconstruction de l’ESH par une greffe osseuse associée à une ostéosynthèse. Dans les cas où la chirurgie conservatrice est impossible (pseudarthrose du col chirurgical associée à une  pseudarthrose des tubérosités ; lésions sévères de la tête humérale ; arthrose post traumatique), les prothèses inversées sont probablement plus adapter. Il faut bien prévoir le risque infectieux, particulièrement en cas de reprise chirurgicale. La difficulté per opératoire principale est de restaurer la « bonne hauteur » humérale pour que la prothèse soit stable. Quand la perte de substance osseuse métaphyso épiphysaire est importante, il est difficile de restaurer cette bonne hauteur en per opératoire malgré une programmation pré opératoire soigneuse. Dans ces cas particuliers, le réglage de la hauteur est fondamental par l’utilisation d’implants modulaires. Mais la limite de cette règle reste la tension trop importante imposée au deltoïde, notamment dans les voies d’abord supérieures. Pour cette raison, nous préconisons une voie d’abord delto pectorale élargie, et l’utilisation d’implants de grands diamètres qui offrent une meilleurs stabilité sans pour autant d’avantage de contrainte.

Séquelles de type IV : (cal vicieux sévère des tubérosités)

La prothèse inversée est l’indication de choix dans ces cas. Les résultats pour les prothèses inversées  ont un score de Constant de 75.5%, une EAA de 127° ; alors que les prothèses non contraintes ont un score de Constant est de 55% et une EAA de 81°.

Notre expérience va dans le sens des résultats de ces deux études. Dans les cas des séquelles de factures de l’ESH, particulièrement pour les types II, III et IV , nos indications de prothèses inversées vont croissantes.

Nous avons sélectionné des cas cliniques qui illustrent ces propos. Nous proposons une solution arthroplastique originale pour régler la hauteur de l’implant huméral dans les cas de perte substance osseuse majeure de l’ESH séquellaire de fracture

 

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