L'ACTUALITES SUR LE TENDON CALCANEEN :

Tenolig et suites opératoires ; traitement endoscopique du syndrome de Haglund.

O. LAFFENETRE CHU Pellegrin Bordeaux

Depuis quelques années la chirurgie mini-invasive sous toutes ses formes envahit la discipline chirurgicale orthopédique et traumatologique : le tendon calcanéen n'échappe pas à cette évolution.

Tenolig et suites opératoires

Les ruptures tendineuses, si fréquentes et en particulier chez les sportifs, bénéficient largement d'une approche chirurgicale. A côté des techniques classiques dites " ouvertes ", allant de la simple suture, à des gestes plus complexes de reconstruction ou renforts par différents éléments anatomiques de voisinage, se sont développées un certain nombre de techniques mini-invasives parmi lesquelles la ténorraphie per-cutanée (DELPONTE) par Tenolig. La technique a déjà fait l'objet de multiples descriptions et n'a pas besoin d'être rappelée ; il est beaucoup plus intéressant de s'attarder sur les suites opératoires. Il faut tout d'abord préciser que l'immobilisation post-opératoire durant les trois premières semaines est facultative ; le patient quitte en général le service le lendemain de l'intervention après avoir bénéficié d'une première séance de mobilisation douce faite par un kinésithérapeute, qui lui explique en même temps les différentes étapes de la prise en charge post-opératoire. Une ordonnance de soins infirmiers lui est remise à la fois pour les trois semaines d'héparinothérapie, et les soins de propreté du matériel pour les six semaines à venir.

Phase 1 : J0 à J21. L'appui n'est pas autorisé, la prophylaxie anti-thrombotique par héparine de bas poids moléculaire mise en route. Le patient est verticalisé sous couverts de cannes anglaises. Il bénéficie trois à cinq fois par semaine, à domicile de séances de mobilisation passive, active aidée douce puis active en prenant bien garde à rester en dessous du seuil douloureux ; l'objectif à atteindre est la position neutre de la cheville à la troisième semaine en décharge. A l'issue de cette première phase, le patient est revu en consultation, muni d'une orthèse de marche amovible type ORTHOMARCHE si celle-ci lui a été prescrite d'emblée, ou l'apportant dans le cas contraire (prescription remise à la sortie).

Phase 2 : J22 à J45. Lors de cette consultation, l'on aura vérifié la bonne tolérance du matériel, le bon déroulement de la rééducation et le cas échéant, appris au patient comment se déplacer en plein appui grâce à son orthèse. L'anticoagulation peut être suspendue et le travail actif sous contrôle du kinésithérapeute, intensifié. Vers J30 une consultation programmée chez un podologue permet la prise d'empreinte pour réaliser une paire d'orthèses plantaires, qui seront livrées juste avant l'ablation du matériel, prévue sous anesthésie locale lors d'une hospitalisation ambulatoire vers le 45e jour.

Phase 3 : J46 à J90. Reprise de l'appui complet chaussé et du pas déroulé sous couvert des orthèses plantaires qui seront régulièrement amincies de 5 mm tous les 10 à 15 jours. Démarrage d'une rééducation proprioceptive en décharge puis en charge, poursuite de la récupération des amplitudes articulaires et de la re musculation du triceps sural.

Phase 4 : après J90. Les orthèses plantaires ont été définitivement abandonnées, un éventuel trouble statique dépisté peut être appareillé ; reprise progressive de la course sur terrain plat, puis reprise douce de l'entraînement sportif s'il y a lieu.

Ainsi, dès la prise en charge initiale, le patient est informé de l'ensemble du suivi qui va être mis en place, orienté vers des professionnels (kinésithérapeutes, podologues) connaissant parfaitement cette technique chirurgicale et les objectifs de la prise en charge post-opératoire, qui s'en voit ainsi significativement améliorée.

Traitement endoscopique du syndrome de Haglund.

Haglund a décrit en 1928 ces " calcanéus hauts et pointus, bossus en arrière " et la maladie qui porte aujourd'hui son nom : il ne s'agit en fait que de l'expression clinique finalement la plus rare du syndrome de Haglund, qui la plupart du temps se traduit cliniquement par une tendinopathie calcanéenne. En effet, si la dysmorphie de la grosse tubérosité est directement responsable de l'apparition d'une bursite rétro-tendineuse si le contrefort de la chaussure est trop rigide, il faut prendre en compte également l'importance du degré de verticalisation du calcanéus, qui majore le simple conflit mécanique en " éloignant vers l'arrière " contre la face antérieure du tendon la saillie osseuse. C'est ce qu'analyse l'angle de CHAUVEAUX -LIET, différence entre la pente calcanéenne a (N 15-18°) et b l'angle postérieur (N 8-10°) : il permet de fixer ainsi les indications en fonction de sa valeur (N < 10-12°). Les deux tableaux les plus fréquemment rencontrés sont la bursite pré-tendineuse, inflammation de la bourse séreuse constante permettant la réflexion du tendon contre le sommet de la tubérosité (elle s'apparente à une péri-tendinite), ou une véritable tendinose mécanique (dans notre expérience chez le sportif, la déformation de Haglund est présente dans 25% des cas chez les patients qui présentent une tendinose).

En cas d'échec du traitement médical (à priori suffisant pour un angle CL compris entre 12 et 18°) bien conduit qui associera de la kinésithérapie et des orthèses plantaires re horizontalisant le calcanéus et modifiant les rapports os-tendon dans la chaussure (talonnette biseautée de 7-8 mm de hauteur dans un matériau de forte densité), le traitement chirurgical peut être indiqué : soit classique à ciel ouvert par résection de la tubérosité plus ou moins associée à un peignage tendineux (angle CL compris entre 18 et 30°), ou par ostéotomie type Zadek dans les déformations majeures (angle CL > 30°) ; soit mini invasif en réséquant par méthode endoscopique extra-articulaire la tubérosité.

L'intervention est réalisée en décubitus ventral, sous anesthésie loco-régionale et garrot pneumatique au mollet. Un petit billot est placé sous la jambe pour surélever le talon, et permettre les mouvements de flexion plantaire et dorsale de la cheville. On utilise un optique standard de 4 mm et une instrumentation motorisée classique. Comme toujours en arthroscopie il faut repérer au préalable les structures osseuses (malléoles, grosse tubérosité) et le tendon, pour marquer les deux points d'entrée, 1 à 2 cm au-dessus du bord postéro-supérieur de l'os, à la face antérieure du tendon ; la pénétration des instruments est plongeante à 45°, et de proximal en distal pour aller au contact du " toit " calcanéen. On commence par débrider la bourse séreuse souvent inflammatoire et à se faire une chambre de travail, avant d'attaquer la résection osseuse proprement dite, sous contrôle de la vue, et en protégeant le tendon au moyen d'une aiguille. Toute la difficulté consiste à quantifier l'importance de la résection d'où l'intérêt de la planification pré-opératoire avec l'angle CL et de l'utilisation de l'amplificateur de brillance au début de l'expérience. Les suites sont extrêmement simples avec une sortie à J1 et une déambulation pendant un mois sous couvert de cannes anglaises avec appui en fonction du seuil douloureux et réalisation de mouvements actifs de la cheville en auto-rééducation 4 fois par jour. Van Dijk rapportait en 2001 les résultats d'une première série de 21 cas avec un seul résultat moyen et l'absence de complication, résultat acquis à 7 semaines et reprise du sport à 10 semaines en moyenne.

Cette approche dont les suites sont simples a aujourd'hui notre préférence lorsque la tendinopathie calcanéenne est absente ou du moins ne domine pas le tableau clinique : comme Van Dijk nous avons pu constater son caractère remarquablement peu agressif par rapport aux techniques conventionnelles, son taux de morbidité nul et l'excellence des résultats qu'elle apporte régulièrement.

 

 

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