La prothèse discale LP ESP®

J.-Y. Lazennec, H. Pascal-Mousselard, O. Ricart, M.-A. Rousseau et G. Saillant

 

Les prothèses discales représentent aujourd’hui un centre d’intérêt considérable en termes de recherche et aussi de marketing dans les milieux de la chirurgie du rachis. L’histoire de l’arthroplastie discale en est encore à ses balbutiements. Ce développement très ralenti est lié à l’absence de stratégie diagnostique fiable et d’indication universellement acceptée pour le traitement chirurgical des lombalgies sur dégénérescence discale. Le remplacement discal constitue un challenge chirurgical et technologique qui a suscité Le développement de plusieurs concepts. Certains considèrent le disque comme une articulation périphérique et des implants non contraints, semi-contraints et contraints ont été mis au point. Malgré les nombreux développements de ces dernières années, le remplacement discal par les prothèses « classiques » est confronté à des problèmes conceptuels et technologiques. La jonction intervertébrale n’est pas une « articulation », mais un joint : les prothèses « articulaires » actuelles se heurtent à des problèmes de frottement et d’usure, à la difficulté de contrôler l’amplitude des mouvements, aux conséquences de la dispersion des « centres instantanés de rotation ». Les systèmes développés par analogie avec les autres articulations cherchent à pallier ces difficultés par des procédés plus ou moins contraints et sensibles aux imprécisions de pose. En outre, les implants classiques cher- chent seulement à restituer de la mobilité sans intégrer l’autre caractéristique essentielle du segment rachidien, la capacité d’amortissement. La prothèse discale LP ESP® représente une solution alternative pour reconstituer un joint intervertébral. Cet implant est basé sur un concept original de type « cylindre bloc » cherchant à restituer à la fois mobilité et amortissement. Le système est constitué de deux plateaux d’alliage de titane (TA6V ELI) qui encadrent un joint intermédiaire composite. Les plateaux vertébraux comportent de petites dents et sont recouverts d’hydroxyapatite et de T40 pour favoriser l’ostéo-intégration. La partie centrale composite compressible est constituée d’un silicone (Silbione RTV 71556) et d’un polymère (Expancel) ; l’anneau périphérique mécaniquement actif est un polycarbonate uréthane (Bionate 80A). La mobilité et la capacité d’absorption dépendent de la morphologie de la partie intermédiaire, ainsi que de diverses options de composition, offrant diverses possibilités de choix en fonction des caractéristiques souhaitées pour le remplacement discal. L’amplitude de la lordose peut être choisie en fonction du design des plateaux. Les premières implantations ont été réalisées en 2004 après une longue période de mise au point incluant les tests de biocompatibilité et des essais mécaniques à 40 millions de cycles et, pour des situations extrêmes, en compression-cisaillement. Ce programme d’essais particulièrement sévère a permis de démontrer l’absence de perte de masse du système, la stabilité en termes de rigidité et de cohésion entre les plateaux et la partie centrale composite. À ce jour, les résultats cliniques sont équivalents à ceux des autres séries avec une durée opératoire moindre compte tenu de l’implantation plus facile, en monobloc, de la prothèse. La dégénérescence discale reste encore le sujet de bien des controverses et l’arthrodèse lombaire conservera ses indications dans des domaines aussi divers que les traumatismes, les déformations et les grandes déstabilisations. Les profils d’indication favorable de la prothèse discale restent similaires à ceux de la greffe antérieure mini-invasive avec cage (ALIF). Le problème est de situer l’arthroplastie discale dans les étapes chronologiques de la prise en charge de la dégénérescence discale et d’évaluer ses avantages pour le patient aussi bien en termes de résultat clinique final que de rapidité de récupération fonctionnelle. La place de l’arthroplastie discale reste encore mal définie, alors que ses objectifs sont ambitieux, visant à restaurer et imiter la mobilité segmentaire et à reconstituer les conditions de mise en charge du disque. Les indications de prothèse discale sont aujourd’hui justifiées par deux objectifs principaux : la préservation de la mobilité et la prévention de la détérioration du disque adjacent. Mais il est impossible d’affirmer avec certitude que la préservation de la mobilité constitue un garant de l’épargne des autres étages et, plus encore, il est impossible de préciser la quantité de mobilité adéquate pour chaque sujet, en tenant compte de sa morphologie rachidienne et de son état fonctionnel global. Outre la récupération de la mobilité en valeur absolue, les études suggèrent l’importance de la qualité des mouvements en terme de centres instantanés de rotation et de l’épargne des apophyses articulaires postérieures. Des notions nouvelles se profilent également concernant l’équilibre des tissus mous périphériques et l’impact du profil sagittal et des paramètres lombo-pelviens pour le choix des implants et leur réglage. Quels que soient les systèmes utilisés, les études prospectives montrent aujourd’hui la non-infériorité du remplacement discal par rapport aux techniques d’arthrodèse classiques. Le point essentiel reste la rationalisation des indications et la sélection des patients basées sur des éléments cliniques et en particulier psychologiques, et sur des données d’imagerie et en particulier l’IRM.



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